Il n’y a pas que l’Ajax, le PSV Eindhoven ou Feyenoord aux Pays-Bas. Dans l’ombre des trois géants qui trustent les titres de champion d’Eredivisie depuis 2011, il existe aussi de belles histoires, comme celle que vit Almere City. Ce petit club né en 1997, situé en périphérie d’Amsterdam et fondé sur un polder aménagé il y a une cinquantaine d’années, vit la première saison de son histoire en D1 néerlandaise. Et il pourrait se maintenir en cas de succès sur Heerenveen, ce vendredi soir (20 heures), dans son petit stade de 5 000 places, toujours garni de supporters aux anges.
Ce petit exploit en passe d’être réalisé est aussi l’oeuvre de quatre Français, qui ont tous découvert cette année l’élite néerlandaise, attirés par un club inconnu du public hexagonal. Ils expliquent leur expérience.
Thomas Robinet, de l’ombre du National à une efficacité phénoménale
À 27 ans, il est le plus expérimenté de la colonie tricolore et sans conteste celui dont l’arrivée était la plus inattendue. Formé à Sochaux, avec lequel il a connu la Ligue 2, Thomas Robinet était un habitué du National (Villefranche, Laval, Châteauroux, Nancy) et l’attaquant y marquait a minima 8 buts chaque saison. « Pour moi, l’opportunité était extraordinaire », s’enthousiasme-t-il. Depuis l’été dernier, il en est à… 11 dans le sixième Championnat le plus relevé d’Europe, ce qui en fait le meilleur buteur du club et l’un des plus gros scoreurs français à l’étranger.
Une performance d’autant plus marquante qu’il a inscrit la majorité de ses buts dans un rôle nouveau, plus reculé, en numéro 10. « Le coach (Alex Pastoor) a voulu me tester à ce poste où je devais défendre comme un milieu, retrace Robinet, au départ surpris de cette tâche. Les deux premiers matches qu’on a faits, on gagne et je marque à chaque fois. Ça a lancé une série de matches au milieu. J’ai dû faire moitié-moitié cette saison entre l’attaque et le milieu, même si je reste un numéro 9 pur. »
Au-delà du football et de son rôle à la Griezmann, l’ex-Sochalien s’éclate chez les Bataves. « C’était l’occasion de faire découvrir une autre culture à ma famille, d’apprendre l’anglais, de vivre autrement, apprécie-t-il. Et ici, pour les attaquants, c’est intéressant parce que ça va vraiment vite, c’est très intense. »
Yoann Cathline, le prêt qui attire les regards
Il est le seul du groupe à avoir véritablement goûté à la Ligue 1. C’était la saison dernière, et Yoann Cathline était apparu 23 fois dans l’élite avec Lorient, dont la moitié comme titulaire. L’été dernier, les Merlus ont fait le choix surprenant de constituer un effectif sans ailier. Alors pour continuer à engranger du temps de jeu, le jeune homme de 21 ans est parti en prêt (sans option d’achat) à Almere, séduit par son explosivité et sa forte capacité d’élimination, et en contrepartie City lui offrait une exposition dans le Championnat qui suit la France à l’indice UEFA.
Mais les débuts n’ont pas été simples. « Je n’ai commencé qu’un match titulaire sur la première partie de saison, c’était compliqué mais j’ai progressé sur l’aspect mental », affirme le joueur passé par Guingamp. Et puis tout a changé à la mi-décembre, avec un déclic contre Vitesse (5-0) : il marque un but et gagne une place dans le onze qu’il ne lâchera plus. « On me demande de prendre plus de responsabilités maintenant, parce que je suis devenu un joueur très important de l’équipe », relaie-t-il.
Il en est aujourd’hui à 6 buts, dont certains marqués sur des exploits individuels, et 4 passes décisives toutes compétitions confondues. Un joli bilan acquis dans un rôle qui alterne entre un poste de piston pas vraiment fait pour lui mais auquel il s’adapte et celui d’ailier, qui correspond à son profil. Ses performances lui valent aujourd’hui d’être suivi de très près par le PSV, Feyenoord et Utrecht. « Je suis épanoui à l’heure actuelle aux Pays-Bas. Et je sais que je le serai si j’y continue. »
Loïc Mbe Soh, la pige réussie
Avec lui aussi, Almere City espérait compter sur le prêt d’un jeune à fort potentiel désireux de passer un cap. Après une pige réussie de six mois à Guingamp (L2) au premier semestre 2023, le musculeux défenseur central de Nottingham Forest, ralenti par une blessure durant la préparation, est arrivé à la fin du mercato estival. « Je voulais être dans la continuité de ce que j’avais fait à l’EAG, être cette saison dans une Ligue supérieure à la L2, justifie l’ancien titi parisien. J’en suis très content. »
Sa première titularisation fut marquante, puisque Mbe Soh (22 ans) a réalisé une passe décisive à Utrecht (2-0, le 30 septembre), qui a contribué à enfin lancer Almere dans sa saison après six premières journées sans victoire. « Je n’étais pas totalement prêt mais je devais vite l’être parce qu’on avait besoin de moi rapidement. Alors je suis allé au combat. C’était facile parce que j’ai beaucoup été soutenu par les supporters, par l’excitation qu’on ressentait en ville. »
Dans la foulée, son entraîneur s’est appuyé sur ses qualités, notamment le duel et sa capacité de relance, pour en faire un titulaire régulier dans une défense à quatre ou à cinq. Puis, le maintien en bonne voie, Almere a pris le parti de donner plus de temps de jeu à des défenseurs qui n’étaient pas en prêt. « Mais j’ai pris un peu plus d’expérience, c’est vraiment ce que j’espérais », relève Mbe Soh, qui compte 18 matches d’Eredivisie.
Théo Barbet, de la montée à la confirmation
Il est le plus ancien de la mini-armada française d’Almere. Formé à Dijon puis passé par le Lokomotiv Zagreb, Théo Barbet avait eu un rôle central dans la montée acquise il y a un an. « La plus belle expérience que j’ai vécue dans ma jeune carrière, en sourit-il encore. On parle d’un club qui grandit d’année en année, qui se développe à tous les niveaux (le stade va être agrandi cet été) et la montée était encore plus belle parce qu’on est passé par les play-offs alors que personne ne s’y attendait. »
Arrivé libre l’été 2022, après une préparation avec l’UNFP et un essai d’une semaine, le défenseur axial gauche de 23 ans a lui aussi bien grandi, avec un statut de titulaire aux Pays-Bas et un rôle d’ambassadeur officieux du club : « Ça m’a fait plaisir de voir arriver des Français l’été dernier, j’ai même contribué à les faire venir parce que le directeur sportif (Johan Hansma) m’a demandé de leur écrire pour leur décrire le club. Tous ceux à qui j’ai parlé sont venus (notamment Mbe Soh qui était en équipe de France de jeunes avec lui), donc je ferais un bon commercial ! On fait une belle saison parce qu’on a vite pris des points finalement (Almere est 13e). » Si l’équipe parvenait à en prendre trois de plus ce vendredi, elle en aurait suffisamment pour ne pas se faire rattraper par Waalwijk, le barragiste. Et la fête serait belle.