C’est une mesure qui fait beaucoup réagir, en particulier la gauche, depuis qu’elle a été présentée par Jordan Bardella ce lundi 24 juin. Le président du Rassemblement national veut interdire l’accès à certains postes stratégiques à des personnes ayant une double nationalité. Une mesure qui fait partie du programme du RN, si le parti parvient à former un gouvernement à l’issue des élections législatives (30 juin-7 juillet).
Quelques dizaines d’emplois très sensibles concernés
“Est-ce qu’aujourd’hui on imagine un Franco-Russe travailler au ministère des Armées ?”. Voilà comment Jordan Bardella a présenté la mesure portée par son parti. Pour éviter des conflits d’intérêt dans des secteurs stratégiques comme la défense, la sécurité et le nucléaire, le RN veut donc les réserver à des personnes qui ont uniquement la nationalité française.
La restriction concernerait uniquement des emplois très sensibles. Quelques dizaines de postes a précisé Marine Le Pen, sur X. “Cette courte liste serait revue très régulièrement en fonction de l’actualité géopolitique et de ses conséquences pour notre pays”, ajoute-t-elle. Elle assure par ailleurs que les personnes ayant une double nationalité pourront continuer d’occuper tous les emplois de la fonction publique.
Il existe dans la loi française des métiers dit de “souveraineté” (diplomatie, défense budget) qui sont réservés aux Français. Mais en théorie, avoir une seconde nationalité en plus, n’empêche pas d’y accéder. Les ressortissants européens peuvent, eux, devenir fonctionnaires s’ils réussissent les concours de la fonction publique. Une fonction publique qui est aussi ouverte aux ressortissants hors union-européenne, mais seulement en qualité de contractuels.
Une révision constitutionnelle pour appliquer la mesure ?
Selon plusieurs professeurs de droit interrogés par l’AFP, une telle disposition demanderait une révision de la constitution. “Viser les personnes qui détiennent une autre nationalité est totalement inconstitutionnel”, explique Gwénaële Calvès, professeure en droit public à Cergy-Pontoise. Elle relève par ailleurs, que de nombreux pays ne permettent pas de renoncer à sa nationalité.
“Il est inscrit nulle part que vous êtes binational” et “il n’y a aucune instance de contrôle”, rappelle pour sa part Serge Slama, professeur de droit public à l’Université Grenoble-Alpes. La proposition du RN “est totalement impraticable”, selon lui et ouvre la possibilité de “recours devant la Cour européenne des droits de l’Homme ou le Conseil d’État” .