Pour relancer et structurer la filière de la laine en France, trop mal valorisée et en difficulté, le collectif Tricolor a publié une “feuille de route”, à la demande du gouvernement, en actant sept recommandations.
Pour relancer et structurer la filière de la laine en France, trop mal valorisée et en difficulté, le collectif Tricolor, une association à vocation interprofessionnelle, a publié une “feuille de route” ce jeudi 16 mai, à la demande du gouvernement, dans laquelle sept recommandations sont proposées. Focus sur la laine de mouton qui, dans la construction et le bâtiment, sert d’isolant biosourcé.
Un cheptel de 5,4 millions de bêtes
Alors que le cheptel ovin français est estimé à 5,4 millions de bêtes, produisant chaque année quelque 10 100 tonnes de toisons, selon le rapport de Tricolor, 4 % seulement de cette production est valorisée, selon la profession. Or, l’objectif serait, d’ici à 2030, de parvenir à valoriser 50 % des toisons, soit 5 000 tonnes, et ce tout en visant un revenu potentiel de 2,9 millions d’euros pour les éleveurs. À horizon 2040, l’objectif est d’atteindre une production entièrement valorisée, pour un revenu pour les éleveurs estimé à 8,3 millions d’euros.
Marc Fesneau, le ministre de l’Agriculture, a déclaré, dans une vidéo diffusée en amont de la présentation de la feuille de route, que “la valorisation de la laine française” est un enjeu “de plus juste rémunération des éleveurs ovins“, et que cela “permettra de contribuer à un regain de la souveraineté française dans de nombreux secteurs : industrie textile, isolation, fertilisants“.
Certains, comme la société coopérative MOS-Laine, située à Réchicourt-le-Château, en Moselle, n’ont pas attendu le gouvernement pour réagir et valoriser la laine locale. Grâce au dynamisme d’un noyau d’éleveurs convaincus, les producteurs de laine, les entreprises de la filière, les représentants de la profession agricole et les collectivités territoriales ont décidé d’unir leurs forces pour créer la société coopérative MOS-Laine. Aujourd’hui, plus de 50 coopérateurs sont associés au sein du projet. Une partie de cette maine sert comme isolant. © MOS-Laine
Sept propositions pour la feuille de route
Parmi les sept principales propositions de la feuille de route, l’association Tricolor suggère :
– d’assurer une meilleure connaissance du cheptel français en renforçant la collecte de données,
– de développer comme de promouvoir de bonnes pratiques d’élevage,
– ou encore de “sensibiliser les éleveurs de moutons à l’intérêt de produire une laine et des peaux de qualité et ce, dès leur formation initiale“.
Le logo de l’association Tricolor, à vocation interprofessionnelle qui rassemble éleveurs ovins, artisans, manufactures, acteurs de la création, de la distribution, et territoires. © Laure Pophillat / Tricolor
En sus, Tricolor demande aussi à l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) et du CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) de “coordonner des travaux de recherche permettant de qualifier la laine de mouton française comme isolant et de développer des procédés de fabrication“.
Enfin, et non des moindres, l’association compte saisir l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’Environnement et du Travail) afin de “demander de réaliser une identification et une évaluation des risques sanitaires et environnementaux” de l’utilisation comme fertilisant de la laine de mouton brute.
En réaction à cette feuille de route de Tricolor, la Confédération Paysanne, troisième syndicat agricole en France, déclare dans son communiqué de presse regretter “l’absence d’acteurs indispensables (négociants, structures artisanales, petites industries déjà actives…) et la sur-représentation des start-up et de l’industrie de la mode” dans le travail présenté.
La laine de mouton : quelle utilisation dans la filière bâtiment et construction ?
Un fort pouvoir isolant
La laine de mouton possède naturellement un fort pouvoir isolant : lambda (λ) 0,035 à 0,042, du même ordre que la laine de roche. Non seulement elle est légère et souple, mais en plus la laine de mouton déveoppe des propriétés hydro-régulatrices : elle peut absorber jusqu’à 33 % de son poids en condensation tout en conservant intactes ses qualités isolantes, et ce sans risque de moisissure.
À l’achat, toutefois, elle demeure plus onéreuse que les laines de verre et de roche.
La préparation de la laine de mouton
La laine de mouton ne pouvant s’utiliser brute, une préparation spécifique est nécessaire. Tout d’abord, les fibres subissent un premier lavage afin d’en éliminer les souillures comme l’odeur redoutable. Ensuite, elles sont dégraissées par rinçage. Enfin, après une pléthore de lavages et rinçages, la laine est traitée contre les mites et le feu.
À partir de là, deux procédés demeurent en concurrence : pour le premier, il s’agit d’immerger la laine dans un bain contenant une urée de synthèse (connue sous le nom de Mitin FF), ou alors, pour le second, de la mettre dans un bain au sel de bore.
Ensuite, la laine est séchée et compressée. Elle peut alors s’utiliser telle quelle (en vrac) ou être cardée et transformée en rouleaux et panneaux, et ce afin qu’elle demeure pratique à poser dans les combles et les rampants, sous toiture, dans des cloisons creuses, sur les planchers …
La laine de mouton aiguilletée contient 100 % de laine de mouton, tandis que la laine de mouton thermoliée contient du polyester qui permet le façonnage de panneaux semi-rigides. La laine de mouton en vrac, qui se commercialise sous forme de sac de 10 kg, est idéale pour isoler les combles perdus, notamment lorsque vous avez tout un espace à remplir. © Tricolor
La laine de mouton offre des performances thermiques hivernales méritoires, du moins avec une épaisseur de laine conséquente. A contrario, le confort estival peut laisser à désirer, surtout dans une région avec de longues périodes de journées chaudes. C’est également un excellent régulateur hygroscopique, dotée d’une capacité naturelle, celle d’absorber le tiers de son poids en eau sans altérer ses performances thermiques et de la restituer ensuite progressivement.
Toutes ces raisons font qu’elle demeure un isolant biosourcé très intéressant.
Source : batirama.com / Laure Pophillat