Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine peuvent-ils arriver à un accord de désescalade ? Malgré de féroces combats dans les régions de l’Est de l’Ukraine, les deux belligérants tenteraient de mettre un terme à leurs frappes à longue distance sur les infrastructures énergétiques, qui causent de sérieux dommages à Kiev comme Moscou.
Raffineries pétrolières contre centrales électriques
Si l’Ukraine est en difficulté dans l’est du pays depuis plusieurs mois, avec des avancées russes dans plusieurs points du Donbass, Kiev tente de riposter sur d’autres fronts pour rééquilibrer le conflit. Les frappes à l’aide de drones ou de missiles ont chassé la flotte russe des ports de Crimée, alors que Moscou déplore la perte de nombreux navires en Mer Noire. Les drones ukrainiens s’en prennent également à une autre cible, tout aussi importante : les infrastructures énergétiques russes telles que les raffineries, vulnérables même à plusieurs centaines de kilomètres du front.
Mais Moscou n’est pas en reste : la Russie a relancé sa campagne de frappes contre le réseau électrique ukrainien, menaçant de plonger le pays dans le noir à l’approche de 2025. Si sa précédente tentative avait échoué durant l’hiver 2022/2023, en raison de frappes dirigées principalement vers les infrastructures de transport et distribution d’électricité, le Kremlin remporte cette fois-ci des succès indéniables.
Les attaques à coups de drones et missiles visent cette fois-ci non pas des infrastructures de transport facilement réparables, mais les centres de production d’énergie, comme les centrales thermiques et hydroélectriques. Entre ces frappes et la capture de plusieurs zones de production d’ampleur, comme la centrale nucléaire de Zaporijjia, la production d’énergie ukrainienne a été diminuée d’environ 65 % depuis le début du conflit, d’après une étude de l’École polytechnique fédérale de Zurich datant de septembre. L’Ukraine, un des plus grands producteurs d’énergie d’Europe, ne peut désormais pas subvenir aux besoins énergétiques de sa population.
Vers un accord à l’aide du Qatar ?
Ces frappes mutuelles, qui diminuent les capacités d’exportation d’hydrocarbures russes et menacent le moral ukrainien, pourraient cependant bientôt s’arrêter. Selon le Financial Times (FT), les autorités russes et ukrainiennes ont commencé des discussions, à l’aide de la médiation du Qatar, pour mettre fin à ces attaques affaiblissant chaque camp. Ce dialogue a en fait déjà quasiment abouti entre juin et août, avant d’être stoppé par l’invasion de la région russe de Koursk, selon le média britannique.
Un accord d’une telle ampleur entre Kiev et Moscou serait inédit depuis le non-renouvellement par la Russie de l’accord sur les céréales ukrainiennes, permettant à l’Ukraine d’exporter des denrées alimentaires depuis ses ports non occupés dans le but d’éviter une crise alimentaire globale.
Mais plusieurs autres officiels ukrainiens contactés par le FT expliquent qu’un accord tacite avait en réalité déjà été atteint pour l’hiver 2023-2024, expliquant l’absence de frappes russes contre le réseau énergétique ukrainien. Les frappes de Kiev contre des installations pétrolières à partir de février 2024 ont poussé Moscou à repartir à l’offensive, avec pour nouvelle cible les centres de productions énergétiques. En conséquence, selon l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, “quasiment toutes les grandes centrales électriques ukrainiennes ont été attaquées depuis février 2022”.
Des négociations bloquées par la question de Koursk
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déjà évoqué la possibilité d’un tel accord, expliquant à la presse le 21 octobre 2024 qu'”en ce qui concerne l’énergie et la liberté de navigation, l’obtention d’un résultat sur ces points serait le signe que la Russie est peut-être prête à mettre fin à la guerre”.
Selon un officiel ukrainien interrogé par le FT, les deux pays ont déjà diminué la fréquence de leurs attaques contre les infrastructures énergétiques ennemies. La question de l’invasion ukrainienne de Koursk, qui a poussé Moscou à se retirer des précédents pourparlers, reste cependant en suspens : le retrait des troupes de Kiev de cette région pourrait être un prérequis pour Vladimir Poutine, alors que l’Ukraine continue de défendre avec acharnement les pans de cette région qu’elle occupe.