«Les ministres c’est un peu comme les trains : les trains passent mais les gares restent ». Cette formule empruntée à Fadila Khattabi, ministre chargée des Personnes âgées et des Personnes handicapées, pourrait bien résumer l’état d’esprit dans lequel se trouvent les membres du gouvernement de Gabriel Attal. Des ministres dans les cartons sans connaître la date du déménagement.
Emmanuel Macron a repoussé la démission de son Premier ministre qui reste en place jusqu’à la nomination d’un nouveau chef du gouvernement. Il continue alors de chapeauter ses différents ministres qui, malgré une fin qui approche, « resteront aux responsabilités jusqu’à la dernière seconde », assure la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot.
Affaires courantes et passation
La période est trouble, incertaine, mais les ministres en place continuent de gérer les affaires courantes, signer les décrets d’application des lois récemment votées. C’est le cas notamment de Fadila Khattabi qui veille à la mise en œuvre de la loi « bien vieillir », adoptée par le parlement en mars dernier. « On a le sens des responsabilités, on est ministre jusqu’au bout », insiste-t-elle, malgré les montagnes russes d’émotion et les turbulences suscitées par la dissolution de l’Assemblée nationale. Le but, c’est d’assurer la continuité de l’action prise par l’Etat, en attendant que d’autres prennent le relais.
Pour préparer ces futurs remplaçants au mieux, au ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, on s’attelle à rédiger des notes et un dossier synthétique pour que « le ou la prochaine ministre ait accès à des éléments très concrets », explique un conseiller du gouvernement. Même chose au ministère de la Fonction publique de Stanislas Guerini où les membres du cabinet se concentrent également sur les dispositifs d’accompagnement des agents pour les Jeux olympiques sur des questions aussi pratiques que le télétravail, le compte épargne-temps, les primes…
Certains dossiers sont plus difficiles à lâcher que d’autres. Fadila Khattabi va voir les Jeux paralympiques lui passer sous le nez. Alors, forcément, « il y a une petite frustration ». « On y a travaillé, on a les mains dans le cambouis depuis des mois voire des années. A la veille de l’événement, on n’est pas au rendez-vous alors qu’on devait être au cœur du réacteur, c’est un peu décevant oui », confie la ministre, sans cacher ressentir « un peu de tristesse ».
Rythme au ralenti
On est sur un agenda de fin de partie. Un peu comme la fameuse semaine avant les vacances où la motivation peut baisser, sauf que là, les ministres savent qu’ils ne reviendront probablement pas. « Je ne vous cache pas qu’on est sûrement sur un rythme moins forcené que celui sur lequel on a été toute l’année », lâche ainsi un conseiller du gouvernement.
Du côté du porte-parolat, Prisca Thevenot concentre davantage ses efforts pour « faire en sorte que tout ce qui a été fait ces dernières années ne soit pas perdu » car « tout peut être défait aussi rapidement que ça a été fait », craint-elle. Pour le reste, La porte-parole réélue députée de la 8e circonscription des Hauts-de-Seine a déjà connu une situation semblable lors du remaniement en janvier qui s’apparentait à peu de chose près aux turbulences actuelles. « Les équipes, nos cabinets, sont formées à ça », rassure-t-elle.
Une chose est sûre : le manque de visibilité ne permet pas de se projeter. Aucune nouvelle décision, aucun nouveau budget, aucune nouvelle loi ne peut être enclenchée. D’ailleurs, « le gouvernement actuel arrive à son terme donc il ne serait pas normal de se projeter à outrance », souligne le conseiller du gouvernement.
Préparer son avenir
Sur les bancs de l’Assemblée nationale pour Prisca Thevenot, plus incertain pour Fadila Khattabi, c’est aussi l’heure d’anticiper son avenir professionnel. Pour la ministre déléguée auprès de la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, ce départ c’est d’abord l’occasion de renouer avec sa famille. Mère, épouse et depuis quelques mois « jeune grand-mère », elle va s’offrir un peu de vacances en attendant la suite des aventures. Mais « quand on tombe dans la politique, ça ne s’arrête jamais vraiment, je n’ai pas dit mon dernier mot », prévient celle pour qui « le combat continue » dans une situation qu’elle juge « difficile, complexe ».
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Non sans un pincement au cœur et un émoi certain dans la voix, Fadila Khattabi rapporte qu’elle prévoit de faire ses adieux à son équipe dimanche prochain, l’occasion de faire un pot devant le feu d’artifice du 14-Juillet. « Quand vous avez partagé pendant un an plein de choses, c’est toujours compliqué, s’émeut-elle. J’ai été très heureuse, très fière de servir mon pays en tant que députée et en tant que ministre avec un portefeuille très humain, et j’ai le sentiment d’avoir fait avancer certains sujets ». Partir, parfois pour mieux revenir, ce sont les aléas de la vie que les politiques ont choisie.