Cherchez un job, trouvez une arnaque ! – 🔴 Info Libertaire

Cherchez un job, trouvez une arnaque ! – 🔴 Info Libertaire

Enquête à l’appui, la CGT révèle que plus de la moitié des offres d’emploi sur le site France Travail sont hors des clous. Les patrons mentiraient comme des arracheurs de dents, par écrit dans des offres d’emplois, sur le site institutionnel de France Travail ? Avec la bénédiction de l’institution et au service d’une politique qui fait la chasse aux « sans-dents » !

C’est la foire aux promesses illégales et aux offres carrément bidons. Après un testing, le Comité national CGT des travailleurs privés d’emploi et précaires (CNTPEP-CGT) conclut que 55% des offres d’emploi présentes sur le site France Travail sont illégales. Rappelons qu’une étude montre qu’en 2016 les privées d’emploi [1] sont 30% à avoir sérieusement songé à se suicider ou à l’avoir tenté… contre 19% chez les actifs et actives [2]. Ajoutons à cela, après deux réformes de l’assurance chômage, la crise du Covid, un gouvernement qui nous martèle les bienfaits de la « valeur travail » et des revenus de transfert [3] qui ne sont pas à la hauteur . Ce testing a de quoi remonter le moral aux plus de 5 millions de personnes tenues de rechercher un emploi [4]…

France Travail affirme, de son côté, que « seules » 7% des offres sont illégales. On est sur une différence de 1 à 8. Mais sur les 5 000 offres examinées par l’agence, la moitié provenait de leur base de données. Or 80% des offres du site émanent en réalité aujourd’ hui de « partenaires », des agrégateurs d’offres comme Hellowork ou Jobijoba, et c’est ici que se concentrent les arnaques. Il n’est donc pas étonnant que France Travail aboutisse à un taux inférieur.

De plus, là où France Travail s’est contenté d’une analyse lexicale, la CNTPEP-CGT va plus loin. En effet, ils complètent leur enquête d’un appel à l’employeur pour le confronter à son offre. Ô Surprise ! Des offres ne correspondent pas à l’annonce. Ainsi, derrière des offres pour des emplois de plusieurs mois se cachent en fait des jobs de quelques jours proposés par des agences d’intérim.

Dur avec les privées d’emploi…

Le testing de la CNTPEP-CGT révèle également des manquements pour la moitié des missions de France Travail. La mission « d’accompagnement dans la recherche d’un emploi » semble désormais guider les privées d’emploi dans l’impasse d’une recherche chimérique ou d’un emploi ne respectant pas le Code du travail. La « mise en relation » oriente vers des employeurs peu scrupuleux. Sa mission « de contrôle », qui ne concerne que les privées d’emploi sous indemnités, laisse le patronat tranquille. Et pour la « maitrise des données », on repassera vu ce qu’on trouve sur le site internet. Un service public à sens unique, d’une main de fer pour les privées d’emploi et à la solde du patronat.

… doux avec le patronat !

Si des candidates et candidates sont tenues de répondre de bonne foi lors des recrutements [5], il semblerait que les patrons en soient exemptés. Et pourtant, à raison de 37 000 euros d’amende pour chaque annonceur à l’origine d’une offre frauduleuse [6] il y aurait quelques dizaines de milliards d’euros à récupérer. Cela devrait susciter l’intérêt du Premier ministre Barnier dans sa lutte contre l’endettement de l’État, mais aussi du ministre de l’intérieur Retailleau et son intransigeance contre les vils délinquants. À quand les charters pour renvoyer les patrons voyous en Capitalistie ?

Plus concrètement, les camarades de la CGT ont appelé la Direction générale de France Travail à réaliser une étude indépendante qui serait confiée à la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes. Cela permettrait de trancher le dissensus engendré par leurs enquêtes. Sans grande surprise la direction n’a pas donné suite.

L’enquête ouvrière et ses débouchés

On comprend les camarades qui souhaitent avoir gage de foi dans cette affaire, mais on peut s’interroger également sur le fait de donner aux institutions dominantes l’aval d’un outil qui sert nos intérêts de classe. L’enquête ouvrière comme arme de lutte, comme constitutive des lignes politiques de la classe mais aussi comme un moyen pour les contre-pouvoirs de servir et rencontrer le prolétariat ne doit pas être abandonnée aux mains de l’ennemi.

Ce que nous révèle en réalité cet aveu de faiblesse est la difficulté des syndicats à structurer, organiser et massifier le mouvement syndical chez les privées d’emploi et donc à protéger leurs intérêts qui sont ceux de l’ensemble de notre classe. Ce manque s’explique par la composition hétérogène des privées d’emploi, par la temporalité d’une position qui se veut temporaire mais aussi par le manque d’investissement historique des syndicats.

Il est donc primordial qu’en tant que militantes libertaires, syndicalistes, privées d’emploi, travailleuses et travailleurs, nous nous attelions à la défense de nos droits par la lutte collective. Sans quoi, nos droits de privées d’emploi continueront d’être malmenées par le talon de fer du capitalisme.

Téo (UCL Paris nord-est)


La guerre méthodologique

France Travail critique la méthode de la CNTPEP-CGT sur la représentativité de l’échantillon, c’est-à-dire la capacité des offres testées à correspondre à l’ensemble des offres présentes sur le site de France Travail.

Elle reproche à l’échantillon d’être plus petit (1844 contre 5000), de porter sur peu de secteurs professionnels (trois secteurs contre tous secteurs) et de se focaliser sur certaines villes (douze villes contre toute la France). Et de conclure : « l’analyse du CNTPEP-CGT ne serait pas valable pour l’ensemble des offres ». Des arguments légitimes et probablement assumés par le CNTPEP-CGT qui laissent penser à un manque de force plus qu’à un manque de bonne foi.

Mais des marges d’erreur statistiques ne sauraient expliquer seules l’écart entre les deux études.

Du côté de l’étude de France Travail, on constate que l’échantillon n’est pas représentatif de la réalité des privées d’emploi, 50% des offres de l’échantillon proviennent de la base de données de France Travail alors qu’elles ne sont que de 20% sur le site. L’institution se contente d’une recherche sur les offres écrites en sachant qu’elle ne correspondent pas toujours à la réalité.

Il est clair que le choix méthodologique de France Travail minimise le nombre d’offres frauduleuses. Offensive contre la méthodologie de la CGT, défensive face à une éventuelle enquête indépendante…

Cela fait penser à un enjeu bien plus politique que méthodologique. Et comme l’affirme le secrétaire du CNTPEP-CGT, Pierre Cardonier, cela cache probablement la volonté de « tronquer la réalité et renforcer le contrôle de la recherche d’emploi » par « l’argument d’autorité du nombre d’emplois disponibles ».




Source: Unioncommunistelibertaire.org

Related Articles