Budget 2025 : le gouvernement veut autoriser les casinos en ligne pour les taxer, plusieurs centaines de millions d’euros à la clé

Budget 2025 : le gouvernement veut autoriser les casinos en ligne pour les taxer, plusieurs centaines de millions d’euros à la clé

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Alors que les casinos en ligne étrangers attirent des millions de Français en dehors de tout cadre légal, le gouvernement propose un amendement au budget pour les autoriser en France afin de les taxer, mais les propriétaires de casinos sont vent debout.

C’est un amendement qui bouleverse le monde des casinos et des jeux d’argent. Dans le cadre du projet de loi de finances, le gouvernement propose un amendement qui autorise l’ouverture des casinos en ligne en France, qui est le seul pays de l’UE, avec Chypre, à interdire le blackjack, la roulette ou encore les machines à sous sur internet, alors que sont autorisés en ligne les jeux de loterie, les paris sportifs et le poker en ligne, seul jeu de cartes admis. Mais plus de trois millions de Français auraient joué illégalement en 2023 sur des sites opérant depuis l’étranger, d’après le régulateur des jeux d’argent et de hasard, l’Autorité nationale des Jeux (ANJ). Des sites souvent installés dans des paradis fiscaux. Le gouvernement y voit une manne financière inexploitée, alors qu’il cherche désespérément à trouver de nouvelles sources de revenus pour son budget 2025.

L’amendement gouvernemental, déposé samedi, veut dans la foulée taxer le produit brut des jeux (PBJ), c’est-à-dire le montant des mises des joueurs déduction faite de leurs gains, à hauteur de 27,8 % au titre de l’imposition des entreprises et également de 27,8 % pour les prélèvements sociaux, soit un total de 55,6 %. Cette taxe pourrait rapporter au budget plusieurs centaines de millions sachant que selon une étude de l’ANJ, le produit brut des jeux venant de sites illégaux se situerait entre 748 millions et 1,5 milliard d’euros, soit entre 5 % et 11 % du marché global des jeux d’argent.

Si les joueurs qui misent sur des sites étrangers reviennent sur une offre française, cela rapportait donc mathématiquement, au mieux, 800 millions d’euros annuellement à l’Etat. C’est aussi un moyen selon l’exécutif de «limiter l’impact sur la santé publique des consommateurs de jeux en ligne, de contrôler cette offre de jeux qui ne cesse de croître et de tenter d’assécher l’offre illégale, il convient d’assurer une réelle régulation des jeux de casino en ligne.» Si l‘Etat se résigne à autoriser les casinos en ligne, c’est aussi faute d’endiguer les sites basés à l’étranger. Depuis mars 2022, l’Autorité nationale des jeux, qui peut désormais interdire des sites sans passer par un juge, a bien réussi à bloquer 2365 Url mais des sites miroir sont aussitôt recréés, explique le gouvernement dans son argumentaire.

Les groupes de casinos en colère

Cet amendement a indigné les acteurs français des casinos physiques. Grégory Rabuel, président du syndicat Casinos de France et directeur général du Groupe Barrière, se dit «abasourdi» par cette annonce. «C’est un choix irréfléchi, sans aucune concertation, brutale et précipitée», affirme-t-il. Cela représenterait selon lui une perte annuelle de 450 millions d’euros pour l’Etat et les communes qui abritent des casinos, à cause de la baisse du chiffre d’affaires de ces établissements. C’est également selon lui prendre le risque de «détruire une filière» et de voir fermer 30 % des casinos français, soit 65 sur 202, ainsi que de fortement impacter ceux qui pourraient survivre avec une perte de 20 à 30 % de leur PBJ. 15 000 emplois seraient alors supprimés dans les douze mois d’après ses estimations. Au final, l’impact sera potentiellement négatif sur la fiscalité selon Grégory Rabuel pour qui cela mettrait fin également à une exception française des casinos en Europe. L’Hexagone possède à elle seule 40 % des établissements de jeux européens.

Du côté de la Française des jeux, qui opère des jeux en lignes légaux, on se dit «réservé». Selon elle les risques des phénomènes d’addiction inquiètent la FDJ car des études ont mis en évidence que les casinos sur internet provoquent des pratiques de jeu plus intenses. la FDJ vient pourtant de racheter le suédois Kindred, un des leaders européens des casinos en ligne. Ce qui ne signifie pas, explique la Française des Jeux – dans laquelle l’Etat détient 20 % du capital – qu’elle se lancerait forcément dans cette activité en France.

Dans un entretien aux Echos, Isabelle Falque-Pierrotin, la présidente de l’ANJ, prévient que «l’ouverture du marché du casino en ligne ne peut pas être une décision de stricte opportunité» et estime qu’il existe un réel danger de voir augmenter le nombre de joueurs excessifs sans réussir à empêcher l’offre illégale de prospérer. De son côté, le gouvernement reconnaît un risque d’addiction mais renvoie à une «régulation spécifique» à définir avec l’Autorité nationale des jeux, «par voie d’ordonnance».

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