Notre invité aujourd’hui est maître de conférences en géographie humaine en Suède et militant pour le climat. Son essai Comment saboter un pipeline, pourtant paru en 2020 aux éditions La Fabrique, a connu un retentissement l’année dernière car il a été cité en note de bas de page dans un décret du Ministère de l’Intérieur prononçant la dissolution de différentes associations militantes, dont les Soulèvements de la Terre. Dans quelle mesure sa pensée incarne-t-elle une rupture avec le pacifisme des mouvements écologistes actuels ?
Pour la distinction nature / culture
Selon Andreas Malm, le projet de dissolution hybride entre nature et social du philosophe Bruno Latour est un échec : “cela ne nous aide pas à comprendre la crise climatique actuelle“.
C’est ce qu’il explique dans Avis de tempête, Nature et culture dans un monde qui se réchauffe (éditions La Fabrique, 2023) : c’est précisément “quand la nature entre en collision avec des processus sociaux que l’effondrement se produit, et c’est pour cette raison qu’il faut reprendre le contrôle de ces processus“.
Il reconnaît cependant que cette théorie n’a de pertinence que dans le champ universitaire, analytique, et qu’elle n’a pas nécessairement d’impact concret dans le champ militant.
La crise climatique vue par le marxisme
Andreas Malm critique l’approche qui consiste à mettre en avant l’Anthropocène pour saisir la crise climatique : pour lui, c’est le système capitaliste qui est responsable de la crise, et non l’ensemble de l’humanité. Il préfère ainsi parler de Capitalocène.
Il appelle donc au sabotage des infrastructures qui soutiennent le processus capitaliste : “c’est du désarmement, c’est une manière d’éviter des massacres en maintenant les énergies fossiles sous terre“. Andreas Malm précise très clairement qu’il est contre la violence envers les humains, mais estime que la destruction d’objets qui détruisent des vies est légitime.
“Il est difficile d’estimer l’ampleur de l’impact de cette forme de lutte, mais il est certain que le mouvement du climat doit devenir plus vaste pour qu’il ait des effets réels.”
Extraits sonores :
- Archive de Bruno Latour datant du 25 janvier 2002 dans “A voix nue” sur France Culture
- Archive de 1954 sur la mise en place d’un pipeline dans “Paris vous parle”
- Chanson de fin : Pipeliner’s Blues de Moon Mullican